La scène métal française, c’est un océan de groupes qui suent sang et passion, une myriade de fans prêts à sacrifier des tympans pour une octave de plus… bref, une culture vivante. Pourtant, essaie donc de capter Gojira, Tagada Jones ou Mass Hysteria entre deux tubes des années 80 sur la FM. Spoiler : tu risques surtout de t’en prendre aux boutons de ton autoradio. L’absence du métal sur les grandes ondes françaises, c’est comme si on tentait de faire une raclette sans fromage : absurde, creux, frustrant.
Retour dans les années 80 : Trust fait trembler les murs, les mômes s’arrachent les vinyles d’ADX, Sortilège, Vulcain. On a même droit à des émissions cultes comme « Wango Tango » sur Europe 1, et des passages (timides) dans des émissions généralistes (Bernard Lenoir sur France Inter, respect). Mais globalement, le métal reste le vilain canard, toléré à la marge, mis dans la case “bruit de sauvage”. Flash-forward en 2024 : c’est le blackout. Zéro émission métal sur les grands réseaux nationaux. Même les radios de niches, du genre Ouï FM ou feu Le Mouv’ (aujourd’hui rebaptisé Mouv’ et voué au hip-hop), ont déserté la scène.
Imagine la scène : tu as plus de chances d’écouter du Céline Dion en boucle sur une radio “rock” française que d’entendre un blast beat. Oui, c’est tragique.
Ce désamour auto-entretenu sent fort la peur du risque. La FM française reste coincée sur des formats hyper conventionnels, bouffés par la pub ou obsédés par la course à la ménagère de moins de 50 ans. Le métal, trop subversif, trop bruyant, trop “pas pour tout le monde”. Traduisons : le problème, c’est pas l’absence d’auditeurs, c’est juste qu’ils n’ont pas les mêmes costumes-cravate que les décideurs.
Paradoxe délicieux : les chiffres d’IFOP/Deezer en 2019 montraient que 15% des moins de 35 ans citent le métal parmi leurs genres favoris en streaming. Donc, la soif existe. Mais la FM reste sourde.
Accroche ton tuner, on entre en zone underground. Car oui, si la FM classique se fait la belle, le métal subsiste sur les marges :
Aucun de ces bastions n’a la portée de Skyrock ou Nostalgie, faut pas rêver. Mais ils maintiennent la flamme, et prouvent qu’une communauté existe. Preuve, Radio Metal revendique plus de 500,000 auditeurs mensuels en 2023 – des chiffres loin d’être ridicules pour un média indépendant (Radio Metal).
On ne va pas se mentir : la communauté métal a migré en masse vers le streaming et le web. Pourquoi s’entêter à attendre du Slayer à 15h sur une radio généraliste quand Spotify ou Bandcamp offrent des playlists death, black, thrash et métalcore à volonté ?
Ce basculement numérique ruine-t-il tout espoir de voir le métal regagner la FM ? Pas forcément. Mais il confirme une chose : le public existe, il attend juste qu’on le serve.
Un joli cercle (pas vraiment) vertueux.
La FM française ferait bien de tendre l’oreille – ou alors, qu’elle sache qu’on n’aura pas peur de faire trembler les murs autrement.
Alors, oui, la radio française a largement tourné le dos au métal. Pas par manque de public ou de créateurs, mais par inertie et peur de sortir du moule. L’underground continue de rugir, d’innover, de rallier une nouvelle génération de furieux qui ne passera plus par la case FM pour s’éclater. Mais paradoxalement, c’est peut-être ça la victoire. Moins dépendants, plus libres, les acteurs de la scène métal inventent leur propre média, refusent les compromis, et fédèrent une communauté soudée prête à se passer des vieilles ondes. Tant pis si la FM fait la sourde oreille ; la révolte s’écoute ailleurs… et elle n’a jamais eu aussi bon goût.