Il existe des labels qui collectionnent les signatures comme d’autres collectionnaient les posters de Korn en 5e. Dead Seed Productions, fondé en 2012 dans les tréfonds underground, ne fait rien comme tout le monde. Ici, on parle d’un bouclier et d’un amplificateur (ça tombe bien), pas d’une usine aseptisée à “talents-bankables”. Eux, ils tabassent juste ce qu’il faut, là où il faut : dans le soutien à la vraie scène extrême (black, death, doom, dark ambient et hybrides mutants).
La French Touch en métal, c’est pas juste Gojira, messieurs-dames. Dead Seed Productions, c’est le labo occulte derrière :
Aaah, Dead Seed Productions, ou le projet franco-norvégien (basé à Caen et Oslo, tu l’as). Fondé par Valnoir alias Jean-Emmanuel Simoulin – yes, le même que Metastazis, l’atelier graphique ayant signé la DA de Watain, Paradise Lost ou Behemoth (Source). Son credo : le vinyle, le DIY, la passion. Et, il faut le dire, une fidélité à la scène hexagonale rarement vue depuis la grande époque de Holy Records.
Le label a sorti à ce jour plus de 45 références (vinyles, cassettes, CD, splits et éditions limitées) entre 2012 et 2024. La philosophie ? Zéro concessions. Dead Seed gère tout : enregistrement, production, artwork, impression, et distribution (via leur distro). Bref, le truc intégriste dont rêvent tous les black metalleux allergiques au capitalisme “easy-listening”.
La France regorge d’artisans extrêmes qui finissent trop souvent dans l’ombre de la Suède et de la Floride. Dead Seed Productions leur offre une vitrine, et pas n’importe laquelle : format vinyles noir profond, pressages limités en séries de 300 ou 500 (Discogs). Ici, le fétichisme de l’objet compte autant que la brutalité du contenu.
Quelques exemples :
Ici, pas d’algo Spotify à la ramasse, mais une vraie promo : bouche-à-oreille, réseaux spécialisés (musiciens, chroniqueurs du souterrain) et surtout fanzines ultra-qualitatifs (Hard Force, Metallian Mag, Lords of Chaos). Dead Seed pousse ses groupes sur des scènes pointues (Fall of Summer, Chaos Descends, Hellfest Extreme Market), capitalisant sur la réputation “DIY intransigeant” du label.
Ce qui change tout ? Dead Seed Productions n’est pas là pour remplir les playlists du dimanche matin, mais pour vendre des disques censés vivre 30 ans sur l’étagère, et 30 minutes dans la platine. Chaque sortie :
Pour les fans hardcore, il est devenu presque rituel de précommander on-line, d’attendre la livraison comme un môme sa première basse, et d’ouvrir la galette comme on déploierait un grimoire occulte.
Non, Dead Seed n’aligne pas des clones de Mayhem qui bouffent des rats dans les bois. On parle d’un roster qui a accueilli aussi bien le death tribal de Necroblaspheme que les délires ambient de Frédéric Sacri, ou le “proto-black occulte” d’Aluk Todolo.
À ce jour, 42% des références du label sont le fait d’artistes français ou de formations incluant des membres hexagonaux. (Source : base Discogs, analyse A.C.Y.L). L’autre moitié vient d’obscurs corners européens (Norvège, Pays-Bas, Allemagne) mais toujours dans l’idée de croiser les flux, à la Ghostbusters.
Dead Seed (co)produit aussi des splits internationaux : apareillage entre Vortex of End et des formations allemandes, ou avec des entités norvégiennes du true black.
On ne va pas se mentir : la scène extrême française reste sous-exposée au niveau mondial. Mais avec Dead Seed Productions, certains groupes ont percé des frontières jusque-là verrouillées. Exemples :
Au-delà du disque, Dead Seed organise ou coproduit des événements en France (et jusqu’en Norvège), notamment des showcases itinérants (Paris, Caen, Nantes, Rouen). Et les têtes pensantes du label jouent parfois eux-mêmes dans les groupes : la famille, tu connais.
Historiquement, la prod indépendante hexagonale a souvent été décriée : fétichisme du vinyle, refus du “digital only”, démarche trop élitiste... Mais paradoxalement, Dead Seed Productions prouve qu’un circuit parallèle est encore viable (preuve : les pressages de “L’Être et la nausée” de Vorkreist étaient épuisés en précommande en 2023, avec seulement 6 semaines de promo sur les réseaux spécialisés).
Le marché physique du vinyle extrême reste confidentiel : en 2023, selon le SNEP, moins de 4% des ventes de vinyles concernaient le métal extrême en France. Mais Dead Seed figure dans les top sellers de la catégorie “niche”, devant de plus grosses structures comme Les Acteurs de l’Ombre.
La rareté pousse la demande, la cohérence crée la fidélité. Plutôt que de diluer son catalogue, Dead Seed assume des choix ultra-pointus, privilégiant l’impact à la quantité.
Artiste | Genre | Sortie marquante | Année |
---|---|---|---|
Au Champ des Morts | Black/Post Black | Dans la joie | 2017 |
Vorkreist | Death/Black | L’Être et la nausée | 2023 |
Arkhon Infaustus | Death/Black | Orthodoxyn (réédition/remaster) | 2020 |
Sektarism | Occult Funeral Doom | Spliit with Ibex Angel Order | 2021 |
Necroblaspheme | Death Metal | As Chaos Moves In… | 2015 |
Frédéric Sacri | Dark Ambient/Expérimental | [Various releases] | 2018-2023 |
Dead Seed Productions, c’est ce qui se passe quand on refuse de jouer la carte de la facilité. Le label tisse des liens entre générations de metalleux extrêmes, crée des objets pour fétichistes et fait circuler la “french noireur” dans le reste de l’Europe.
Le modèle ? Sincère, artisanal, porté par une vraie vision artistique : autogéré, passionnel, jamais donneur de leçons mais jamais à la traîne. Tant qu’il y aura des kids prêts à dépenser leur Smic dans un pressage limité, tant que des groupes français voudront sortir des carcans du “made in USA”, Dead Seed poursuivra sa mission : amplifier le chaos, gueuler plus fort, et servir de rampe de lancement à une scène française qui, de l’ombre, sait cracher la lumière.